ANNÉES 7 à 12 / DURÉE SUGGÉRÉE = Trois classes de 60 minutes
« La santé relationnelle est la capacité vitale d’être en lien avec soi-même et avec les autres. Dans une perspective de droits de la personne, le droit de cette dernière à la santé relationnelle assure l’exercice même de tous ses droits fondamentaux — la vie, la sécurité, l’intégrité et la liberté. »i
« La violence, tout le monde en souffre! », poursuit Léonie Couture. Elle en a elle-même souffert, même si ce n’était pas elle qui en recevait directement les coups. Le fait que d’autres personnes subissaient cette violence la perturbait profondément.
Elle a essayé d’établir un début de justice en défendant ceux et celles qui ne pouvaient se défendre eux mêmes.
« J’intervenais en réponse aux difficultés de quelqu’un d’autre. […] C’était à la fois dans le but de protéger cette personne et, par le fait même, de contrer l’injustice. »
Quand, dans la vingtaine, Léonie Couture a quitté le domicile familial pour aller travailler et étudier à Ottawa, l’inégalité entre les sexes était encore une réalité omniprésente. Aussi, avec le décès de son frère qui avait tant subi d’intimidation, elle s’est sentie plus investie que jamais de la mission de soutenir ceux et celles qui ne pouvaient plus se soutenir eux-mêmes.
En pleine montée du mouvement féministe, Léonie Couture, alors à l’Université d’Ottawa, était troublée par la façon dont les philosophes de ses manuels parlaient des femmes, qu’ils présentaient souvent comme des citoyennes de deuxième classe. Elle était encore plus déconcertée de voir que tant d’hommes de son entourage partageaient cette vision des choses.
« Je voulais agir. Je voulais faire quelque chose qui avait un sens. »
En 1981, Léonie Couture travaillait pour le Mouvement contre le viol et l’inceste, un organisme de Montréal où elle a rencontré sa regrettée amie et thérapeute, Shulamit Lechtman.
Avec l’aide de celle-ci, Léonie Couture a compris que les relations malsaines et la violence étaient au premier rang des difficultés auxquelles se heurtaient les femmes.
« Pour marcher, il faut pouvoir s’appuyer sur ses jambes. Si on se casse la jambe, il devient très douloureux et même impossible de marcher dessus. Afin de redonner aux jambes cette capacité de marcher, ce support à la marche, il faut reconnaître les blessures et les réparer. Il en va de même dans les relations. »
Léonie Couture ajoute que notre manque de confiance en nous-même et dans les autres nous empêche d’entretenir des relations saines. Une personne « brisée » perd confiance, tant envers les autres qu’envers elle-même, et ne peut donc avoir de relations saines. La guérison de ses blessures est essentielle pour retrouver sa capacité de vivre des relations harmonieuses. C’est ce qu’on appelle la « bonne santé relationnelle ».
La violence, sexuelle ou autre, envers les femmes peut les réduire à néant et il leur faut alors rebâtir les relations d’abord avec elles-mêmes, puis avec les autres, afin qu’elles retrouvent leur estime d’elles mêmes. « Si vous pensez que vous ne valez rien, vous ne vous battrez pas pour vous-même ni pour rien d’autre… Vous abandonnerez! »
Ce n’est pas que ces femmes ne savent pas être en relation. « Elles ont tellement souffert qu’elles n’ont plus la capacité de faire confiance. »
Quand elle a compris tout cela, Léonie Couture a voulu mettre son apprentissage en pratique.
En 1994, elle a fondé La rue des Femmes, un centre d’accueil pour les femmes sans abri. Au début, le centre ne comptait qu’une table, quelques chaises et un groupe de soutien.
Avec les années, c’est devenu un centre de santé relationnelle, une communauté d’inclusion pour les femmes de Montréal à qui il offre un toit, des repas, du counseling, des activités de réadaptation et la sécurité. Il propose un espace sécuritaire aux femmes, qu’elles aient peur de mourir de faim ou d’être violentées ou jugées, et a pour but premier de leur offrir des soins et des outils pour les aider à guérir et à retrouver la maîtrise de leur vie.
Léonie Couture a toujours un sourire et du temps à donner aux personnes qu’elle croise au centre, que ce soit les membres de son équipe ou d’autres à la cafétéria qui s’attardent en bavardant. Ces femmes qui trouvent à La rue des Femmes un chaleureux abri contre une dure réalité abordent Léonie Couture avec une familiarité confiante. Elle les écoute. Toutes ensemble, elles forment une famille.
Léonie a le sentiment d’avoir fait beaucoup de chemin depuis le début de son périple, il y a plus de 30 ans.
Elle sait que les femmes qu’elle rencontre à La rue des Femmes ont besoin de soins, d’amour et de compassion. « Il est crucial d’aider ces femmes à comprendre leur douleur et ce qui en est la cause, déclare Léonie, afin qu’elles se redécouvrent, se rebâtissent et reprennent leur vie en main. »
« Les expériences que nous vivons nous nourrissent et finissent par nous donner les moyens de faire ce que nous devons faire dans nos vies. Je ne me suis jamais mariée, mais j’ai créé une autre famille. Je me sens privilégiée! »
Ce qui donne à Léonie Couture le courage de continuer, c’est sa conviction que, pour être et demeurer en bonne santé physique et mentale, les femmes doivent retrouver une « bonne santé relationnelle ».
« Je ne sais pas pourquoi certaines choses nous arrivent dans la vie. Nous ne savons pas à quel grand dessein nous sommes conviés, mais il y en a un. Nous ne sommes pas ici par hasard. »
« Toutes les formes de violence se retrouvent dans les violences faites aux femmes et l’humanité toute entière en souffre. »
« Nous ne sommes pas ici pour rien. Il m’arrive de dire à une femme : « je ne sais pas pourquoi ta vie est si difficile, mais je suis sûre que, quelque part, toutes et tous nous contribuons à changer les choses, pour le mieux… »
i Sauf la première et les deux dernières, toutes les citations de Léonie Couture sont traduites librement. Les autres ont été fournies en français par Léonie Couture.